dimanche 15 novembre 2015

Trois pensées

The show must go on. Après l’horreur, il faut bien reprendre le dessus. Ne pas se laisser abattre. Revivre. Ou plutôt continuer à vivre. J’avais décidé que je n’écrirais rien pendant quelques jours, pas la peine d’ajouter des mots aux millions de ceux – et combien en trop ! – qui ont déjà été écrits, prononcés ou éructés à ce sujet.

Mais reprendre le dessus, continuer la vie normale, pour moi c’est impossible si je ne laisse pas mes doigts courir sur mon clavier. Quand on écrit un billet quotidien depuis aussi longtemps, c’est une addiction dont il difficile de se passer. Alors, j’écris et si vous pensez que mes mots sont superflus, ne les lisez pas, effacez-les.

J’ai donc repris ma petite vie ce dimanche matin dans mon jardin. Pour quelques besognes sans intérêt. Parmi celles-ci, il restait dans un coin trois pensées dans des petits pots à replanter depuis deux ou trois semaines. Je l’ai fait, mais en réfléchissant à mon geste. Repiquer trois fleurs en début d’hiver, c’est déjà penser au printemps, au renouveau, au beau temps après les jours glaçants.

Ma première pensée, je l’ai plantée en la dédiant à toutes les victimes des attentats de ce funeste vendredi 13. C’est la pensée de l’émotion.

La deuxième pensée, c’est pour mes enfants et petits enfants. C’est la pensée de la peur. Parce que oui, j’ai peur pour eux, pour leur avenir, pour leur vie dans monde de plus en plus féroce. Mais comme je l’ai entendu hier dans un débat politique intéressant et digne sur FR 2, la peur n’est pas un signe de faiblesse si l’on s’en sert comme catalyseur, moteur à réactions.

Enfin la troisième pensée est celle de la haine, oui de la haine envers la haine. Comme le disait dans le débat d’hier soir Jean-Luc Mélenchon dont je ne partage pas beaucoup d’idées mais que dans ce cas j’approuve à 100%, il est légitime d’haïr la lâcheté, l’intolérance, l’obscurantisme de ces assassins.


Oui, il est légitime d’haïr la haine. Et nécessaire de lui faire la guerre.


J’ai hésité entre mes deux blogs pour la publication de ce billet : le « gentil » habituel ou le noir « J’haine » ? Et j’ai opté pour les deux.






mercredi 4 novembre 2015

Le béton est dans le pré

J’habitais un beau village...

Avec une jolie église au milieu. Et des prés, des fleurs, des chevaux et des moutons autour. Avec un chemin pour les balades à pied ou à vélo en compagnie de mes petits garnements. Souvent, nous allions à l’épicerie de Pinou qui vend les meilleurs Kinder Surprise du monde et on les croquait, assis sur un muret en admirant le coq du clocher, les fleurs dans la prairie ou La jument dans la brume.

J’habitais un beau village... jusqu’il y a quelques jours.

En me rendant chez Pinou la semaine dernière, j’ai eu une mauvaise surprise dans mon Kinder. Sur le terrain vague en contrebas de l’église, là où cet été les villageois se réunissaient encore pour un barbecue de fête, des ouvriers assemblaient un gigantesque mécano de poutrelles d’acier. Je suis allé observer les jours suivants, et le mécano s’est rapidement habillé d’horribles plaques de béton. Désormais, entre l’église et la pittoresque Ferme du Quartier, se dresse un immense hangar qui abritera les moissonneuses-batteuses, les arracheuses de betteraves et les tracteurs géants de pauvres agriculteurs qui ont tant besoin de matériel effrayant comme ces vaisseaux de science-fiction pour bloquer les routes vers Bruxelles quand ils veulent manifester leur mécontentement.

Lorsque j’étais écolier, on nous apprenait qu’il existait deux types d’agriculture : l’intensive dans nos régions où les terrains sont relativement petits et l’extensive dans les grands espaces, américains notamment. Les monstrueuses machines de là-bas ont débarqué chez nous, et d’intensive ou extensive, l’agriculture est devenue intempestive, voire agressive, avec ses véhicules démesurés pour nos petites routes et ses hangars colossaux qui défigurent notre campagne.

J’habitais un beau village, mais ça c’était avant.